Dans deux décisions du Tribunal Judiciaire de Paris en date du 26 octobre 2020 (n° 20/53713 et n° 22/55901), le juge des référés s’est vu confronté à la question de savoir si un bailleur pouvait obtenir en référé la condamnation du locataire à payer les loyers dus au titre du deuxième trimestre 2020, période pendant laquelle de nombreux commerces étaient fermés ou étaient très peu actifs en raison du confinement.
Dans les deux ordonnances rendues, le juge des référés refuse de faire droit à la demande du bailleur concernant les loyers du deuxième trimestre et renvoie les dossiers au fond.
Si le juge relève que les dispositions dérogatoires relatives à la période de crise sanitaire n'interdisent pas l'action du bailleur envers son locataire, il retient in fine que l'exigence de bonne foi dans l'exécution des contrats la rend irrecevable en référé.
En effet, il est rappelé que les contrats doivent être exécutés de bonne foi, ce dont il résulte que les parties sont tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d'exécution de leurs obligations respectives. L'exception d'inexécution, soulevée par le locataire, doit être étudiée à la lumière de l'obligation pour les parties de négocier de bonne foi les modalités d'exécution de leur contrat en présence de circonstances exceptionnelles.
A titre d’exemple, a été considéré comme étant de bonne foi le bailleur qui n'avait pas exigé le paiement immédiat des loyers dans les conditions prévues et avait proposé un aménagement des loyers échus ainsi que le report de l'échéance d'avril à la réouverture des commerces, tandis que le locataire n'avait jamais formalisé de demande claire de remise totale ou partielle de sa dette ni sollicité d'aménagement de ses obligations (TJ Paris 10-7-2020 n° 20/0456).
Dans les deux espèces, le juge constate que les secteurs d'activité des locataires (salle de sport et parapharmacie) ont été fortement perturbés économiquement par le confinement et les restrictions des déplacements de sa clientèle et les locataires justifient par des échanges de courriers s'être rapprochés de leur bailleur pour essayer de trouver une solution amiable.
Il faut donc se référer au comportement des parties et de leurs tentatives pour trouver une solution amiable.
Il en déduit que la demande en paiement est dès lors sérieusement contestable et rejette les demandes formées en référé par les bailleurs.
Ces décisions mettent en lumière les arguments susceptibles d'être opposés par le locataire à la demande de paiement formulée par le bailleur en référé. Ces jurisprudences n’excluent pas l’action au fond du bailleur contre son locataire même si là encore la bonne foi de ce dernier sera examinée par la juridiction.
Hélène CAYLA-DESTREM et Aurore FOURNIER
Comments